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Introduction

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I « Redresser la perspective »

 

Lorsque l’on consulte des manuels techniques qui traitent de la photographie d’architecture, l’impératif le plus constamment cité est l’utilisation d’une chambre professionnelle afin de pouvoir redresser la perspective. Pour quelle raison doit-on, selon ces auteurs, généralement conserver l’horizontalité de l’axe optique lorsque l’on a pour projet de photographier l’architecture? La réponse que l’on peut trouver dans ces manuels consiste à dire que la convergence des lignes verticales (des arêtes des bâtiments) procure une gêne:

« L’effet peu agréable à l’œil de lignes verticales d’un bâtiment qui ne sont pas parallèles gêne même le spectateur qui ne comprend pas grand chose à la photographie »[1] « ... à cause de la convergence des lignes verticales, le spectateur éprouve une sensation de malaise... »[2]

Cette gêne est expliquée par l’habitude que nous aurions de voir et de représenter l’architecture selon un plan lui-même vertical. Pourtant, la plupart des photographies, que ce soit la photographie amateur ou les photographies que l’on peut voir dans les agences immobilières ne respectent pas l’horizontalité de l’axe optique sans que, pour autant, cela nous perturbe véritablement. Pour quelle raison la convergence des lignes verticales est-elle généralement évitée dans certains cas (magazines spécialisés d’architecture, par exemple) et non dans d’autres ? Que signifie redresser la perspective ?

Redresser la perspective signifie généralement corriger la distorsion apparente des formes architecturales ou d’un objet due à l’utilisation d’une vue plongeante ou d’une contre-plongée. Quelle est la nature de cette distorsion ? S’agit-il d’une déformation de la perspective? Pour un praticien comme René Bouillot qui rédige de nombreux manuels techniques,

« on ne devrait pas utiliser ce terme de déformation, car quelque soit l’inclinaison de l’appareil... l’image se projette strictement selon les lois géométriques de la perspective linéaire. »[3]

Pourtant, en note de l’une de ses photographies, il écrit :

« On voit que l’emploi des bascules arrières crée forcément une déformation de la perspective »[4].

Le manque de cohérence ou de clarté du texte de R. Bouillot s’explique par le fait qu’il considère les possibilités de décentrement et de bascule de la chambre comme permettant de déformer les proportions du sujet (anamorphose). Or l’anamorphose est moins une altération de la perspective qu’une accentuation de la perspective. Elle n’en cesse pas pour autant de s’inscrire dans le cadre général des lois de la perspective linéaire. Il est donc nécessaire de chercher à clarifier le langage du photographe

 

[1] Urs Tillmanns in Photographie d’architecture, Grand format créatif, Sinar édition, 1993.

[2] René Bouillot, La pratique du moyen format, Paris, édition VM, 1993.

[3] René Bouillot, Ibid.

[4] René Bouillot, Ibid. Sommaire

 
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